dimanche 19 août 2007

Le signe nu

Le but du voyage c'est je crois d'apprendre à lire les signes. D'abord il faut commencer par supposer qu'ils ont un sens. C'est la différence essentielle entre Freud et Lacan. Freud suppose une signification et les résultats ne se font pas attendre. Mais il demeure toujours une marge entre le signifié et le signifiant, où vient s'inscrire l'interprétation. La place de l'interprète des signes, c'est alors celle du psychanalyste.

Pour Lacan c'est différent en ce sens qu'il le désuppose. Il ne s'agit plus de trouver un sens, parce qu'il y en a toujours un justement, mais d'aller au-delà, de crever l'écran du savoir et d'extraire la substantifique moëlle qui est la jouissance du signifiant. L'interprétation alors se fait plutôt poétique : elle n'est plus orientée vers le savoir.

Cela doit en théorie avoir un certain effet de délivrance pour le patient, l'analysant. Il doit être libéré du savoir. Mais c'est à la condition de faire de la lettre sa cause. Le psychanalyste alors est celui-là même qui y consent. Cela a un prix : la jouissance.

mardi 14 août 2007

Dans la Maison des Ancêtres

Au bout du puits on arrive à la Maison des Ancêtres. Ce ne sont pas seulement les morts, c'est aussi le lieu de l'esprit vivant, le lieu du choeur dont je suis une bouche. Dans les anciennes sociétés, on entrait dans ce lieu par la voie de l'initiation. C'était là que l'individu acquérait son identité sociale et était dés lors pleinement intégré au groupe. Il acquérait aussi du même coup la faculté de se reproduire, soit d'avoir une activité sexuelle officialisée, ritualisée - pas seulement un jeu -, car les ancêtres sont les gardiens des semences. Ainsi à la forme sexuelle naturelle se superposait une forme sexuelle sociale, culturelle, symbolique. Il ne s'agissait pas de reproduire simplement des corps biologiques, mais aussi des âmes...

Dans l'initiation, le candidat acquérait essentiellement un savoir, soit une connaissance des signes a lui révélés, comme on apprend à lire ou à parler. Car la parole est ici encore et toujours essentielle. C'est par et dans la parole que l'esprit des ancêtres demeure. La parole est donc aussi bien mémoire. C'est la forme sociale qui passe, est transmise dans la parole, via les chants, les mythes, les stances sacrées.

Les poètes avaient pour mission d'immortaliser par leurs paroles tel ou tel personnage méritant. Mais ils pouvaient tout aussi bien les maudire. Cela est surtout vrai pour les druides celtiques. Les druides étaient redoutés de tous, rois ou paysans, car ils détenaient un pouvoir immatériel, supérieur à toute force physique. Surtout ils étaient respectés et faisaient autorité. Leur sagesse n'a rien à voir avec celle de nos savants ou de nos philosophes.

Les druides étaient respectés parce qu'ils étaient les dépositaires et les ministres de la parole originaire, la parole ordonnatrice de l'univers (le logos pour les grecs). Nous avons oublié cette puissance de la parole. Les romains l'ont remplacé par l'art de la rhétorique qui a fini par noyer le poisson dans la folie sophistique générale.

Mais qu'est-ce que la parole ? Y a-t-il encore aujourd'hui un noyau sacré possible caché au coeur de la parole ?
* * *

Je crois que la parole est le lieu de notre origine en tant qu'êtres humains, je veux dire autres qu'animaux. C'est le lieu de notre conscience humaine, de notre identité humaine. Soit de ce qui nous fait membre de cette communauté, de cet ensemble qu'est l'humanité. Elle est ce qui nous lie les uns aux autres, et partant nous lie aussi à l'Un originaire. Elle est plus qu'une mémoire, elle est la forme même de notre être.

Alliance de la Maison Humaine

lundi 6 août 2007

We Are One

We Are One (voir cette vidéo sur You Tube)

L'individualisme est mort, car je connais ma propre essence. Je suis une âme dans un choeur : le choeur des ancêtres.

Comment cette connaissance m'est venu ? je n'ai pourtant été initié à aucun mystère !
Je crois en une vérité. Si elle existe, ce n'est pas moi ni personne qui l'invente : elle était déjà là, toujours à (re)découvrir.

Comment je suis tombé dans le bain ?
Je suis passé par une sorte de crise. Au terme explosif d'une analyse. Je veux dire que j'ai osé passé outre les limites de mon moi et découvrir l'autre face de l'être, la face voilée. Le mouvement vient donc bien de moi, parce que j'ai cherché et que j'ai été à l'écoute et que je me suis souvenu. Alors toutes les barrières sont tombées...

samedi 4 août 2007

Quatrième recherche

Pourquoi l'amour est un secret ?

Si dieu a fait un monde parfait, éternel, sans vagues. La reproduction et la sexualité n'y ont pas de place. Elles échappent au "plan divin", sont en trop, sans parler du plaisir... Donc le sexe et l'amour ont toujours un caractère transgressif, même et peut être surtout s'il s'agit d'amour mystique.

Dés lors le sexe est lié au secret. Cela est un effet de la structure symbolique. Lacan (Jacques) a dit : "il n'y a pas de rapport sexuel". Ceci explique le rejet du sexe par les curés qui confondent ordre moral et ordre symbolique. Le sexe représente la faille dans l'ordre éternel métaphysique qui n'est pas l'ordre (ou le désordre ?) naturel. Même la science achoppe là dessus. C'est à dire qu'on ne peut réduire le réel à une suite d'équations logiques. Et c'est tant mieux !

Le sexe implique le temps, le renouveau, la différence. Non pas le cycle, mais la ligne infinie. Ceci n'est pas seulement dangereux pour l'ordre social, l'autorité politique ou savante, mais aussi plus simplement pour l'équilibre psychologique de certaines personnes trop "rigides".

Il faut en peser les conséquences au niveau politique et psychologique. Chaque fois que la politique prétendra s'asseoir sur un savoir scientifiquement (ou religieusement) établi, il y a un danger sérieux pour l'être. Je parle ici du danger totalitaire. Noir, brun, rouge ou vert. Quel que soit ses couleurs - et on ne les connaît pas encore toutes !

Bref : l'amour est un scandale ! Et je ne suis pas parfait.
* * *

Dieu a ordonné le monde selon le principe de la Division : au commencement il a séparé la lumière des ténèbres, le ciel de la terre, les vivants des morts, le passé du futur, etc... Or ce principe d'ordre est stérile. Le monde qu'il gouverne est certes parfait, mais figé dans une immutabilité désolante.

L'homme rencontrant la femme dans le jardin céleste a lui la créature la plus achevée, douée de conscience et de libre arbitre, décidé de transgresser la Loi divine. Du coup il a cessé d'être un homme mythique, idéal, métaphysique et est devenu un être réel, naturel, sexuel.

C'est cela le grand secret gnostique du serpent. Secret qui depuis la plus haute antiquité, avant même l'avènement du christianisme qui n'est pas incomparable, a été par les gardiens de l'ordre pourchassé, refoulé, nié. Et avec l'obsession la plus fanatique, la plus cruelle.

Dieu a instauré la Loi de la Division Universelle. Mais l'homme dans la désobéissance a trouvé l'amour qui est Union. L'amour donc n'est pas de Dieu, il n'appartient pas à Dieu. Plutôt il lui échappe, il lui contrevient. Ainsi l'amour doit il demeurer secret. Sinon il est aussitôt jugé et condamné par la Loi.

L'amour était avant la Loi. L'amour c'est la grande nostalgie de l'Un originaire, l'Un d'avant la division. A cette grande nostalgie obéissent tous les êtres naturels, vivants ou non vivants, biologiques ou minéraux.

Chaque fois que nous faisons l'amour nous revenons à l'Un, au temps d'avant le temps, d'avant la division. Et chaque fois nous transgressons ainsi l'ordre divin. Ceux que cela effrayera cesserons de faire l'acte. A quoi ou à qui croiront-ils alors obéir, si ce n'est à leur propre bêtise ?

jeudi 2 août 2007

Troisième recherche


L'amour est un secret.

C'est pourquoi Bene mon initiatrice innocente tenait une baguette devant ses lèvres. Comme le portrait célèbre d'une femme antique portant le stylet à ses lèvres. Il s'agit bien d'un enseignement et donc d'un savoir. Ce savoir touchant au mystère de l'amour.
Femme au stylet (Sapho de Lesbos ?)
Fresque de Pompéi, Ier siècle av. J.-C.Naples,
MuseoArcheologicoNazionale

Ici c'est la parole qui communique le secret. La parole sortant de la bouche qui est sa matrice.

Bene battait ses lèvres avec la règle/baguette. Ce geste avait quelque chose d'infiniment significatif et sensuel. Un sens sexuel certainement. Mais plus que cela, spirituel aussi. J'y voyais exprimé le désir féminin.

C'était aussi elle qui tenait la baguette, le savoir, le pouvoir. Comme une magicienne ou une fée.


-> Plus d'exemples de gestes symboliques ou sacrés à cette adresse

mercredi 1 août 2007

Deuxième recherche

Et alors ?

1) Je crois en l'existence d'une vérité unique.

2) Je crois que je suis celui qui la dit.

J'ai eu la vision d'un peuple parlant d'une même voix à travers mille bouches. Je suis la vérité multiple, car l'Un est multiple. Or je est l'Un, et le moi est multiple. Mais ce n'est qu'une vision : elle ne fait que témoigner de mon obsession à résoudre la division...

Je voudrais résider dans le bain du langage. Dans le choeur du langage. Loin de nous est la lumière. Nous sommes comme les grenouilles dans la mare. Le langage est une prière adressée à la lumière.

L'essentiel est amour. Si dieu nous aime, nous sommes sauvés. Éclairés. Justifiés. La question de son existence ne se pose pas de manière rationnelle : elle est une nécessité de la structure subjective.

Sans Lui l'ombre reprends sa domination. Nous avons tous besoin d'un père qui nous garde des ténèbres. Car qui suis-je dans ce monde sans fondement, privé de tout appui, de toute raison ? La science est vaine.

Je ne veux pas être du côté de ceux qui s'appuient sur les ténèbres. Qui en font leur certitude, leur principe absolu. Mais qu'est-ce que la lumière et comment nous est-elle donnée ? Faut-il beaucoup souffrir pour mériter Sa grâce ? Luther a déjà répondu. Ce n'est pas la souffrance qui justifie. Bouddha serait assez d'accord avec lui. Le problème, c'est de dépasser la souffrance.

La haine est dans le coeur de l'homme. Ce serait lui (avec elle) qui produirait la souffrance, qui en serait le responsable. La voie consisterait donc à se débarrasser de sa haine, pour s'ouvrir à l'amour du père, toujours déjà là, présent mais ignoré, oublié, bafoué.

Cependant méfions nous des églises et des docteurs de la Loi. Ceux qui condamnent et jugent. La vérité existe, mais elle est transcendante. Elle ne peut se justifier rationnellement. Personne ne peut s'en prétendre le possesseur et en faire autorité. la vérité est dans l'amour. Celui qui bouscule toutes les certitudes. Celui non qui arme, mais qui désarme. Celui qui fait verser les larmes.

On est touché par la grâce, on ne la comprend pas. D'où vient-elle ? Question inutile. Il suffit de l'accepter et de dire merci. Parfois on rencontre des êtres qui nous la révèlent. Eux ne le savent pas. Il suffit d'un geste. D'un mot. D'un signe.

Cela n'a aucun sens ! He oui... J'ai rencontré autrefois une fille qu'on appelait Bene. Ce fut elle qui m'a transmis la fleur du mystère, d'un baiser recueilli sur ses lèvres. Comment une telle chose est-elle possible ?

La rose éclot où elle veut. Souffrez tant que vous voulez, purifiez-vous, mangez casher ou hallal, cela ne servira à rien. Certes on peut prendre cela, des observations rituelles, pour une preuve d'amour. Mais est-on sûr qu'elle trouvera l'adresse ? De quoi se nourrit l'amour ? Certainement pas d'un savoir assuré et opulent.

L'amour ignore la Loi. Non pas qu'il la méprise. Mais il est autre. Il est l'étranger de toute nation, de toute tradition, de toute religion. Parce-qu'il est l'éternel absolu. Aucun prophète n'a dit le dernier mot. Et dieu a toujours des fils.

Entre les hommes et dieu il y a une distance incommensurable. Même à la vitesse de la lumière, on ne peut franchir la bée. Alors comment ? En acceptant de l'aimer, Lui, contre toute raison. Et cela produit quoi ? Un homme nouveau ? Des forts en gueule ? Des va-t-en guerre ?

Non : des amants discrets et solitaires, dont la douceur, la fragilité et la simplicité sont les signes les plus tangibles. Car la force n'est pas lumineuse. Elle est toujours obscure. Et c'est le dernier ennemi dont il faut s'affranchir pour gagner le ciel. Soit la délivrance, la paix, la vérité. Et leur partage. Car sans partage, il n'y a pas d'accomplissement et Dieu demeure oublié.